Nécessité du lien ?

Ceux qui ont suivi notre histoire sur mon ancien blog savent le parcours en dents de scie qui fut le nôtre. J'avais commencé cette nouvelle relation le coeur en fête et la chatte en feu. La réalité, bien entendu, fut bien plus difficile que ce que mon imagination si fertile avait pu anticiper. Cela est normal, cela est la vie, il y a forcément des tensions, des conflits, des moments avec et des moments sans. Certes... Oui, mais...

Oui, mais il y a peut-être également autre chose, de moins perceptible, de moins palpable que la difficulté pour deux êtres par essence différents à créer un lien aussi exigeant. Je pense que ce qui se joue dans les difficultés que les couples sortant de la norme affrontent tous n'est pas lié à cette relation particulière sadomasochiste, domination / soumission et toutes les variantes. Non, ce qui se joue n'a rien à voir avec cela. Cette relation n'est qu'un révélateur de quelque chose déjà existant.

Ce type de sexualité (je devrais dire "ces types" tellement les nuances sont grandes dans notre univers) n'est que lumière, plaisir, liberté, extase. C'est l'autorisation que l'on se donne à vivre tel qu'on l'entend, faisant fis de ce que d'autres avaient décidé avant nous. Je parle de tous les codes de la société normative qui, le pensent beaucoup, veut imposer des façons de faire "normales", par opposition à des façons de faire dites "anormales". Personnellement, cela fait bien, bien longtemps que je ne me fis plus aux normes de la société. Parce que je n'ai jamais compris la logique dans le fait de respecter des normes de vie édictées par quelques-uns que je ne connais même pas. Ce type de relation, donc, est une libération de notre être profond, entier, unique. Une autorisation que l'on se donne à soi-même de vivre tout simplement, pour nous-mêmes et avec nous-mêmes. Oui, je sais, cela est simple à écrire, moins à intégrer et à vivre. J'ai personnellement vécu une période durant laquelle je m'interrogeais sur l'image que me renvoyait ma sexualité si peu "normale". Après avoir voyagé dans les profondeurs de mon être (et quel bordel ce fut ! Je ne suis vraiment, mais vraiment pas dans la norme), j'ai accepté qui j'étais et j'ai pris la décision de laisser exprimer cette énergie en moi.

Oui, ce chemin, cette sexualité, ce lien de couple ne sont que lumière, plaisir, extase. Les deux partenaires sont consentants, sont dans leurs plaisirs réciproques et en profitent autant l'un que l'autre. Quoi de plus lumineux et aligné ? Alors pourquoi tant de doutes, d'incertitudes, de colères refoulées, de manipulation négative, et que sais-je encore ? Car certains ne voient pas la lumière et imaginent l'obscurité. Certains n'assument pas leurs envies et se défoulent sur l'autre, d'autres n'y voient qu'un moyen d'y exprimer leur colère et leur rage du monde. D'autres encore se trouvent comme des enfants devant le bocal de bombons : ils y plongent la main ou la queue, la retirent aussi vite en pleurnichant sur leur incapacité à accepter leurs envies. Tout cela n'est qu'ombre et cela n'a rien à voir avec ce type de lien. Cette ombre est celle que l'on porte en soi et qui émerge en plein jour. Ce n'est alors pas le lien que l'on interroge, mais soi-même : pourquoi suis-je frustré ? Comment fais-je pour ne surtout pas communiquer avec mon / ma partenaire ? Quelle est cette colère en moi ? Cette timidité ? Cette inconstance ? Plonger dans les bas-fonds de notre être permet de rectifier, guérir, avancer, pour nous-mêmes et avec nous-mêmes. Et cela fait, nous pouvons enfin regarder vers l'extérieur et rencontrer l'autre dans son altérité et sa beauté. Et rencontrer l'autre, c'est communiquer avec l'autre.

Communiquer, c'est partir à la découverte de l'autre. Je suis une accro à la communication, car l'autre m'intéresse. Je désire partir à sa rencontre, le découvrir, l'entendre, le sentir, le voir. L'autre m'intéresse et me passionne. Il me faut de la profondeur, un lien particulier même s'il est temporaire. Il me faut être en face d'une personne qui a autant envie de me découvrir que j'ai envie de la découvrir.

Et sans communication, point de lien. Par exemple, je ne suis pas liée à cet homme que j'ai épousé il y a deux décennies, tout comme lui n'est pas lié à moi. Je parle du lien intime, car nous sommes liés autrement. Par le fait que nous partageons l'immense défi de prendre soin de nos enfants et par le fait que nous menons notre barque commune depuis un moment déjà. Nous nous entendons globalement bien et notre vie se passe plutôt bien. Il n'y a tout simplement pas d'alchimie entre nous.

Quand je parle d'alchimie, je parle de ce processus particulier qui permet, en partant d'une matière, d'en créer une autre aux propriétés radicalement différentes. Il y a moi, il y a l'autre et de l'alchimie de notre rencontre se créer un "nous". Nous n'avons pas réussi à créer d'alchimie. Parce que cela ne se devait pas, telle est ma croyance. Alors, comment jouer, partager des jeux sexuels sans ce lien ? Sans ce "nous" ? C'est possible, certes à un niveau moindre, de façon plus épisodique, mais cela est possible. Ce n'est pas ce à quoi j'aspire, mais cela se fait.

Ma grande question a été : serais-je en capacité de jouer avec d'autres sans lien ? La réponse est oui. C'est l'équivalent de manger un plat sans sel, mais cela se mange et cela nourrit.

Actuellement, je rêve de rencontres, de découvertes, de nouvelles possibilités. Avec celui qui partage ma vie ? Peut-être. Seule ? Peut-être. Je n'en sais rien du tout. Pour le moment, j'en suis à un stade où je ne désire qu'une chose : me laisser porter par le courant de la vie et voir où cela me mène. Sans attente ni anticipation. Simplement regarder avec curiosité ce que la vie me réserve. J'avoue, avec un espoir tout de même : qu'il y ait quelques (beaucoup) d'orgasmes et jouissances au passage.

Je navigue libre. Ma seule certitude : tout est lumineux, tout est aligné. Je n'ai plus qu'à construire. J'espère y arriver.